Pour les collectionneurs de marques postales, ce sont deux
branches d'une spécialité unique, partie de l'histoire postale, division
automation, parfois encore appelée "mécanotélie". Mais ce terme est de
moins en moins utilisé. D'abord parce qu'à l'ère de l'électronique,
l'aspect "mécanique"des machines à affranchir et des machines à
oblitérer le courrier ne joue plus qu'un rôle secondaire dans leur
fonctionnement. Ensuite parce que le mot est ambigu : du point de vue
postal, la dite "mécanotélie" recouvre en effet des aspects totalement
différents, voire antinomique de l'acheminement des lettres.
Essayons ici de bien préciser les différences, mais commençons
d'abord par les similitudes qui conduisent parfois à les confondre à
tort.
Des ressemblances dans les empreintes
Prenons l'exemple de ces deux empreintes de Bedarrides. La
première(1A) imprimée sur papier jaune est une empreinte de machine à
affranchir, la seconde (1B) apposée sur lettre, est une flamme
d'oblitération.
1A

1B

Observons leur partie gauche. A la couleur près, rouge pour l'EMA, noire
pour la flamme, et à la taille près, illustration plus grande sur la
première, le dessin est semblable. D'autre part, les deux marques
comportent un cercle, avec à l'intérieur les indications 84 Bedarrides
(en haut) Vaucluse (en bas) et une date au milieu.
Pourtant s'arrêtent là les similitudes. L'essentiel est ailleurs, dans
la partie droite.
Les Flammes
d'oblitération
Observons plus attentivement les marques sur
lettre. Celle de Bedarrides ou celle du Puy en Velay
(2). On notera
immédiatement qu'elles recouvrent un timbre-poste collé. On voit là la
fonction postale essentielle de la flamme "oblitérante", puisque -avant
d'être objet de collection - la marque sert à
annuler le T-P pour en empêcher le
réemploi.
C'est la définition même du terme "oblitération
postale": annulation d'un timbre pour le rendre impropre à servir une
deuxième fois. N'oublions pas qu'en tant que vignette permettant le
paiement de la taxe postale, le T-p possède une valeur fiduciaire
intrinsèque.
(2 )

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Cette fonction d'annulation est normalement assurée par le
timbre à date de l'oblitération qui
est l'élément basique de l'empreinte. Un examen plus fin conduit à y
distinguer 3 éléments:
- L'encadrement: dans nos exemples il est circulaire, mais il existe
d'autres formes (l'hexagone ou l'octogone notamment).
- La couronne: ce sont les indications qui identifient le bureau et/ou
le service utilisateur, ainsi que l'utilisation de la machine.
- Le bloc dateur: constitué de pièces amovibles, il comprend l'heure de
la levée (pas toujours) et la date présentes ici sur trois lignes; mais
sur d'autres machines on les trouve aussi sur 1, 2 ou 4 lignes.
Ce timbre à date est en principe à droite.
Déjà
en 1876, à une époque où seuls des cachets manuels étaient utilisés,
une décision « historique » de la Poste avait attribué au Timbre à date
le rôle d’annuler le Timbre-poste, en lieu et place des Grilles
d’oblitération « losange » employées précédemment à cette fin. Après une
longue période de flottement due à la diversité des machines à oblitérer
apparues au 20ème siècle, cette décision fut formellement
étendue aux oblitérations mécaniques en 1959, ce qui est cohérent avec
la consigne donnée à l’usager de coller son affranchissement en haut et
à droite de l’enveloppe
(3a)

Mais la négligence ou
l’étourderie de l’employé chargé de monter ensemble le T-à-D et la
partie illustrée de la flamme d’oblitération peuvent causer une
inversion ; le timbre à date se retrouvant alors à gauche et
l’illustration à droite (3 B).
(3b)
La flamme d’Orthez 6 3 1974
(3 B) présente en plus un autre dysfonctionnement. Outre son montage
inversé, elle a été frappée en net décalage sur la gauche, de sorte que
le timbre-poste n’a pu être oblitéré. Cette deuxième anomalie, moins
fréquente, peut elle-même avoir eu deux causes : soit
qu’ il y ait eu accélération du pli après le passage d'une lettre
épaisse dans la machine, soit que l'embrayage de l’oblitératrice ait été
mal réglé .
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L'illustration, c'est l'autre partie de
l'empreinte. Par principe, elle est montée à
gauche. Parfois , elle peut également comporter une indication de
service: dans nos deux exemples, la date est répétée. Pour la plupart
des collectionneurs, notamment le "thématiste", c'est
l'élément le plus intéressant. Mais il ne saurait pour autant ignorer
les autres aspects. L'identification des machines, leur type, leur durée
d'emploi sont des domaines d'étude particulièrement riches, bien qu'un
peu arides. Mais heureusement il existe des ouvrages et des catalogues
pour aider le débutant |
Les empreinte de machines à affranchir (EMA)
Pour bien comprendre la différence radicale
qui oppose ce second type d'empreinte au précédent, il faut d'abord se
rappeler ce qu'est un
affranchissement. Pour rester simple, c'est l'acquittement
préalable de la totalité des frais de port d'un courrier. Selon les
époque on a utilisé pour ce faire; des mentions manuscrites, des marques
manuelles spécifiques ( au temps dit de la "pré-philatélie") des
timbres -poste, parfois des fiscaux. Depuis 1924, des machines servent
également à cette fin.
Sous un EMA on ne trouve jamais de TP collé- sauf anomalie ou
complément d'affranchissement pour cause de changement de tarif par
rapport au tarif mémorisé par la machine-. En revanche y figure une
estampille avec valeur indiquée.
Observons nos exemples( 1A et 4) on y voit à droite le tracé d'un
rectangle dentelé évoquant un TP et le simulant. C'et que
l'estampille est en effet un vrai timbre.
(4)

- Dans la partie supérieure, la mention "République
Française" indique que l'opération s'effectue dans un cadre légal,
et qu'il y a -comme pour les T-P - émission de valeur
fiduciaire par la Poste dont le nom apparaît également dans ce
rectangle.
- Au centre se lit la valeur d'affranchissement sur deux
trois ou quatre chiffres, souvent précédés d'un signe typographique.
L'utilisation de ces machines se fait sous le contrôle absolu
de la Poste, à qui l'usager acquitte périodiquement le montant
des taxes dues et totalisées par la machine.
- Enfin, détail important, pour le collectionneur et
l'identification des empreintes: tout en bas de l'estampille, on note un
code alphanumérique. Les lettres renvoient à un type de
machine. Par les lettres NE, nous savons ainsi que l'EMA du
Puy en Velay est issu d'une machine SECAP à commande
électrique, par la lettre R celle de Bédarrides, une machine
ALCATEL de la série R4000, en nous aidant bien sûr des
catalogues spécialisés. Les chiffres correspondent au numéro de
série dans le type: ainsi chaque machine à affranchir est
individualisée par un matricule, comme le sont les voitures sur
le numéro de châssis automobile.
Chaque machine à un totaliseur et un Bureau postal de rattachement.
Depuis l'introduction de l'électronique, certains modèles leur sont
directement reliés. Ce bureau apparaît dans un
bloc dateur analogue à celui des
oblitérations et situé dans la partie du milieu. Sa fonction principale
est - comme son nom l'indique - de dater le jour de l'affranchissement
par l'usager. Le courrier doit être introduit dans le circuit postal le
jour même. A défaut, la lettre doit repasser en machine le lendemain,
pour recevoir une autre EMA avec valeur 000. Mais au contraire des
machines à oblitérer, l'heure ne figure pas .
Dans nos exemples, l'espace de gauche est occupé par un dessin. Cette
partie est appelée bloc publicitaire.
On pourrait aussi bien y trouver un texte, ou rien
du tout. Mais bien sûr, ce sont les EMA illustrées qui intéressent le
plus les collectionneurs - du moins le thématiste -...
Trois autres points à noter:
- La couleur: celle des EMA fût longtemps rouge.
D'ailleurs les collectionneurs italiens, grands amateurs les appellent
"rosso". Mais depuis 2001 la plupart sont devenues bleues,
selon une recommandation de l'UPU, le bleu réagissant mieux
au lecteurs optiques.
- L'oblitération des EMA: on trouve parfois des empreintes
de machines à affranchir surchargées d'une empreinte de
machine à oblitérer, comme dans l'exemple de ce courrier de
la Mairie de Melun 11 8 1971 (ici une Havas P2000) (5)
Mais celles-ci ne sauraient
résulter que d'anomalies et/ou de circonstances exceptionnelles : le
grand principe étant que
l'apposition d'une EMA équivaut en même temps à son oblitération. Chose
logique si l'on se redit que l'oblitération
n'est pas autre chose que l'annulation du timbre-poste. Quel esprit
mal tourné s'essaierait à découper une EMA pour réutiliser la
figurine et affranchir frauduleusement du courrier avec cette découpe?
(5)

- En France, de récentes réorganisations postales ont modifié quelque
peu les règles ci-dessus rappelées, d'autant qu'elles conduisent
sans doute à la disparition des flammes d'oblitérations locales
illustrées .
Par leur ampleur, elles appellent un autre article...
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