LES PONTS DU NIAGARA - 2ème
partie |
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L’ International Railway Bridge (indexé par nous A 1) fut le second pont ferroviaire lancé sur le Niagara, à l’initiative du Grand Trunk Railway System ( le premier étant, rappelons le, le Pont suspendu de Roebling) . Proposé dès 1857, la guerre de Sécession retarda sa réalisation jusqu’à la mise en place d’une Commission internationale créée entre l’Etat de New-York et le Parlement du Dominion canadien. Il ne fut donc construit qu’ entre 1870 et 73. Il était constitué de sept travées à poutre latérale en fer, de portées variables : de 59 à 75 mètres selon une conception due à Casimir Stanislas Gzowski et à D.L. MacPherson, ingénieurs associés. Son édification fut rendue particulièrement délicate par la violence du courant, les fluctuations du niveau du fleuve ainsi que les glaces. Du fait du matériau utilisé, le fer, il devint rapidement obsolète. Ainsi, en 1901 un nouvel ouvrage, en acier, le remplace (index A 2). Le cheminement piéton est supprimé, ce qui va permettre la pose d’une deuxième voie ferrée, rendue particulièrement nécessaire par l’augmentation du trafic transfrontalier. Quelques années plus tard, ce deuxième pont supportera 264 trains en moyenne journalière ! Dans sa structure de 1901, il a servi jusqu’en 1993, date de sa rénovation et de son renforcement financés par le Canadian National Railway. (
* voir sur ce site: Sir Casimir Stanislas Gzowski ) figure 19. L’International Railway Bridge
L’ensemble de l’ouvrage mesure 1113 mètres de long avec ses accès. Il se divise en trois sections : de la rive canadienne par-dessus le Niagara jusqu’à Squaw Island : 599,6 m. – le passage de Squaw Island : 355,7 m. – le franchissement du Black Rock Canal : 157,5 m. Dédié au chemin de fer exclusivement,
l’International Bridge se révèlera assez vite insuffisant pour faire
face à la diversité des besoins de transport dans cette région
bi-nationale de Buffalo – Fort Erié. Déjà en 1893, un groupe
d’investisseurs canadiens s’intéresse à une nouvelle liaison mais recule
devant l’importance des coûts. C’est l’explosion du transport
automobile, durant les années 20 du XX° siècle, qui provoquera la mise à
l’étude du nouveau franchissement, parallèle au pont ferroviaire. Les
deux nations entendent également symboliser leur entente par un ouvrage
de prestige. Le nouveau pont sera construit en amont, à environ 1 km au sud du pont ferroviaire. Cinq arches en acier, d’une ouverture variant entre 105,90 et 129 mètres complétées par une travée à poutre latérales triangulées, portent une chaussée de 37 m. par-dessus le Niagara. Du côté américain, il se prolonge par un franchissement du Black Rock Canal. La longueur totale de l’ensemble atteint ainsi 1770 mètres, dont 1150 pour les parties en acier dont le poids total est de 9800 tonnes. Parmi les entreprises à qui furent confiés les travaux démarrés en 1925, on retrouve Bethlehem Steel Company, associée à Porter of St. Catherines et Turner Construction de Buffalo. Malgré les difficultés du chantier provoquées par des courants violents, la première automobile, conduite par l’ingénieur en chef du projet passe le Peace Bridge le 13 mars 1927. Celui-ci sera définitivement ouvert à la circulation le 1er juin ; l’inauguration officielle se fera le 7 août, en présence du roi Edouard VIII, notamment.
figures 20 & 21.
Timbres USA – Canada émis le 8 avril 1977 pour les cinquante ans du Peace Bridge Depuis n’a cessé de s’affirmer son rôle dans la desserte de cette aire transfrontalière en rapide développement : emprunté par 800000 voitures en 1943, le pont verra passer 5,8 millions de véhicules en 1970. Avec un trafic supérieur à 8 millions, il est à présent le franchissement le plus important entre les Etats-Unis et le Canada. Face à sa congestion permanente, son doublement, à l’identique, a été envisagé en 1993, pour un budget total de 88 millions de $ US. Mais diverses contraintes semblent avoir reporté sine-die la réalisation d’un nouvel ouvrage, puisqu’en 1997 l’entité propriétaire - la Buffalo & Fort Erie Public Bridge Authority - a annoncé un projet plus modeste de réaménagement du pont existant, d’un montant de 17 millions de $ US. |
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Les ponts aval, entre Queenston, Canada et Lewiston, USA, vers le Lac Ontario ( indexés D) Trois derniers ponts sont enfin à présenter. Il s’agit des ouvrages édifiés en aval des Lowers Rapids (« rapides inférieurs »). Après la guerre de 1812, ce secteur avait vu s’édifier différentes localités, dont Queenston et Lewiston, de part et d’autre du Niagara, qui devinrent rapidement des nœuds commerciaux par dessus la frontière internationale ; les échanges s’appuyant sur un système de ferry- boat. Sur proposition d’un ingénieur local, une Queenston Suspension Bridge Company est constituée en 1836 qui recevra la concession d’un pont en 1849, pour des travaux débutés en 1850 sous la direction d’Edward W. Serrel et confiés conjointement à deux entreprises de maçonnerie, canadienne et américaine. Ici pas de cerf-volant pour aider au lancement du premier câble de 317 m. mais un bateau à vapeur tout simplement. Achevé le 20 mars 1851, le premier
Queenston-Lewiston Suspension Bridge (
indexé D 1
) avait une portée de 257 m. et était large de 6 m. de quoi
permettre le passage des piétons et des charrettes pour un péage de 25
c. et un coût final de 40000 $ US. A son ouverture, ce fut le plus grand
pont suspendu du monde. Mais moins de trois ans plus tard, le 3 février 1854, une tempête hivernale le plongera dans les eaux gelées, entraînant le rétablissement des ferries. L’interruption sera de longue durée puisqu’il faudra attendre plus de 40 ans avant qu’il ne soit à nouveau, dans ce secteur, question d’un lien fixe entre les deux rives. Curieusement, l’opportunité de reconstruire un pont à cet endroit va être donnée par la chute de l’Upper Suspension Bridge survenue, on l’a vu, le 10 janvier 1889 (notre réf. B 1) et la décision intervenue dix ans après de démonter son remplaçant (indexé B 1 bis). Sous la maîtrise d’ouvrage de la Pencoyd Bridge Company, la maître d’œuvre Leffert L. Buck va en effet se voir confier l’édification d’une nouvelle liaison entre Queenston et Lewiston à partir d’éléments récupérés sur ce qui pouvait l’être de ces deux derniers ouvrages. Le second Queenston – Lewiston Suspension Bridge ( indexé par nous D 2) sera sensiblement plus long que celui de 1851 et aussi plus large puisqu’il va également devoir supporter une voie des tramways électriques, mode de transport alors en plein développement sur les deux rives d’un site appelé à devenir un centre majeur de production hydro-électrique. Il pèsera environ 1000 tonnes, dont 800 également récupérés de l ‘Upper Suspension Bridge. En outre, les tours du pont seront agrandies et élevées : jusqu’à 7,9 m. côté américain, 6,7 m. côté canadien. figure 22. Carte postale, expédiée depuis Niagara Falls le 3 août 1927. Les rails des tramways sont visibles au centre, les caténaires sur les bords du tablier. Collection MK
Depuis 1953, des négociations étaient en effet engagées en vue de l’érection d’un nouveau pont, à plus forte capacité. A leur origine se trouve la New -York Power Company qui propose de réaliser conjointement une centrale électrique, des parkings et une autoroute du côté américain. Les autorités de l’Ontario ayant donné leur accord et promis le financement des voies d’accès au pont du côté canadien, les études s’engagent en 1958. Elles seront dirigées par les ingénieurs de Hardesty & Hanover associés. La construction sera assurée par Bethlehem Steel Corporation. La présence du Cabinet Hardesty permet de comprendre les airs de ressemblance entre le nouveau franchissement et le Rainbow Bridge (notre référence B 3) : il en est quasiment la réplique. Le Queenston – Lewiston Steel Arch Bridge ( indexé par nous D 3) est en effet, comme son modèle, un pont métallique, en arc encastré. Sa longueur est toutefois supérieure puisque l’arche mesure 304,80 m. et l’ensemble de l’ouvrage 488 m. Son tablier s’élève à 113 m. au dessus du Niagara et supporte quatre voies de circulation.
figure 24. Queenston – Lewiston Steel Arch Bridge, réplique du Rainbow Bridge, en plus grand Il se trouve à 3,2 km au nord du Whirlpool Rapids Bridge (référence C 4) et à un peu plus d’un kilomètre au sud de l’ancien pont suspendu Queenston – Lewiston qu’il remplace officiellement depuis le 1er novembre 1962. Son coût aura été de 16 millions de $ US.
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Entre les secteurs C et D : le téléphérique « espagnol » sur le Whirlpool. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un pont, un dernier
franchissement du Niagara mérite d’être mentionné : on l’appelle Spanish
Aero Car. C’est un téléphérique. Au contraire des autres ouvrages
mentionnés dans ce dossier, il ne remplit pas de rôle international
puisque ses terminus se situent tous deux en territoire canadien. En
fait, il a été construit par - dessus une boucle du fleuve à des fins de
desserte touristique durant la belle saison Ce transbordeur doit son origine à un groupe
d’hommes d’affaires espagnols qui en apportèrent le financement une
fois obtenu l’accord de la Commission canadienne des Parcs du Niagara et
ceux de l’Etat de New – York et du Gouvernement des Etats-Unis (le
téléphérique surplombant le fleuve – à 76 m. – dans son parcours
américain). Conçu par l’ingénieur espagnol Leonardo Torres – Quevado, il fut construit à Bilbao en 1913 et mis en service le 8 août 1916. Sa longueur est de 539 mètres et ses cabines transportent 40 passagers entre Colt’s Point et Thomson Point. De son ouverture à 1968, les familles des financeurs en assurèrent l’exploitation technique et commerciale. Depuis, il est devenu la propriété de la Niagara Parks Commission qui l’a rénové en 1984, remplaçant câbles et circuits électriques et l’a ouvert toute l’année après le réaménagement des cabines, isolées du froid en 2000. figure 26. Autre visuel plus récent Le Spanish Aero Car transporte ainsi 220000 passagers par an. Semble t’il dans d’excellentes conditions de sécurité puisqu’ aucun accident n’y a encore été déploré en près de 90 années de fonctionnement ! |
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Tableau récapitulatif des différents franchissements du Niagara, établi par secteurs géographiques. Ó Michel Krempper 26 mai 2005
Nota (1) En dépit de son importance dans l’histoire des ponts John Augustus Roebling n’a jamais été timbrifiéni dans l’une , ni dans l’autre de ses deux patries. On ne connaît qu’une émission Grenada-Grenadine le représentant avec Einstein et d’autres immigrés aux Usa (Bloc 104 Mi 740)ainsi qu’un entier postal allemand repiqué de 1992. Cette injustice devrait bientôt être réparée car à l’initiative du MotivGruppeIngenieurBauten, et de la ville natale de l’illustre émigrant, Mülhausen,Thüringen, l’Allemagne émettra une vignette postale courant 2006 pour le 200ème anniversaire de la naissance de l’ingénieur. Nota (2) Cette émission ne représente pas l’International Railway Bridge mais l’un de ses deux constructeurs Casimir Stanislas Gzowski, Gouverneur et ingénieur. Bibliogaphie sommaire · Les Ponts du Niagara, dans Marcel Prade, Ingénieur Général Honoraire des Ponts et Chaussées, « Les Grands Ponts du monde, hors d’Europe », pages 79 à 86, collection « Art et Patrimoine », éditions Brissaud, Poitiers, 1992, 312 pages, 800 photos · The interpretation of topographic maps, by R.D. Salisbury & W.W. Salisbury , US Geological Survey, Washington, 1908 · Bridges Over Niagara Falls, a history & pictorial, sur le web par Google · Spanish Aero Car, sur le web par Google · Bulletins trimestriels du MotivGruppe IngenieurBauten E.V, association internationale rattachée à la Fédération allemande de Philatélie : les sommaires de son « Mitteilungsblatt » sont consultables sur son site internet.
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